Stéphane Laporte

Stéphane Laporte trouve souvent les bons mots pour réussir à toucher les gens qui le lise.  Avec le temps des Fêtes qui approche, il est important de se rappeler l’important de l’amour de nos proches.

Dans un texte publié dans La Presse+, il touche plusieurs sujets comme l’isolement des personnes seules et des personnes âgées durant le temps des Fêtes, dans un texte intitulé « À l’enfant que je n’ai pas« . Voici le texte en question, difficile de ne pas avoir envie de verser une larme:

« Je n’ai pas d’enfant. Ce n’est pas par choix. Vraiment pas. C’est juste que mes amours ne se sont jamais rendus jusque-là. Je sais qu’il me manque ce qu’il y a de plus beau. Je n’en suis pas malheureux. Ce sont les bonheurs perdus qui rendent malheureux. Les bonheurs inconnus rendent rêveurs. Pas de larmes dans mes yeux. Juste un peu de brume.

À Noël, la brume est plus dense. Plus épaisse. Le cœur s’embrouille. Tant que mon père et ma mère vivaient, je pouvais me dire que c’était moi, l’enfant de la fête. Le grand enfant. Mais mon père et ma mère sont disparus. Leur course est finie. Je me retrouve avec le témoin dans les mains. Et personne à qui le donner. Que le ciel vers lequel le tendre.

Je n’ai pas d’enfant. Alors, je suis bien placé pour vous dire, à vous qui en avez, que vous êtes chanceux, que vous êtes bénis. Je sais que ce n’est pas toujours facile. Avoir un enfant, c’est ne plus avoir de vie. C’est en avoir deux, trois, quatre. C’est accaparant, épuisant, préoccupant, épeurant. Et c’est pour ça que c’est si merveilleux. Quelqu’un a besoin de vous. Tellement. C’est le plus beau des cadeaux.

On peut très bien vivre sans avoir besoin de personne. Faire son chemin. Être fort. Foncer. Gagner. Être à l’épreuve de tout. Ce qui va finir par nous rattraper, c’est que personne n’ait besoin de nous.

Les gens seuls ne sont pas tristes parce que personne n’est avec eux, ils sont tristes parce que personne n’a besoin d’eux pour être heureux. Se forcer pour aller les voir, c’est gentil, c’est un pansement pour leur âme. Mais la douce guérison, c’est quelqu’un qui en a envie. Rien ne vaut la présence de quelqu’un qui ne voudrait pas être ailleurs. S’attacher, c’est ça. Avoir quelqu’un après nous. […]

À tous ceux qui cherchent un sens à Noël, c’est pourtant évident, Noël, c’est la fête de tous les enfants en même temps. L’humanité est une grande famille. Une grande famille souvent dysfonctionnelle, mais une famille quand même!

L’espoir du monde, il est là. Qu’il s’appelle Jésus, Maurice ou Mohammed. Les seuls qui peuvent changer le monde, ce sont eux. Tous les enfants en même temps. À minuit, c’est l’ultime vœu. Que grâce à eux, tout aille mieux. Avec leurs grands yeux et leur rire éclatant, avec la page blanche qu’ils ont dans les mains, et leurs crayons pleins de couleurs, c’est certain qu’ils en sont capables. Le problème, c’est qu’ils apprennent en imitant ce que l’on fait. Et ce que l’on défait. Alors le monde ne change pas. Et continue à se faire mal. […]

À l’enfant que je n’ai pas, j’aurais aimé lui apprendre à marcher et à tomber, à parler et à écouter, à lire, à écrire et à se relire, à additionner et à donner, à croire en lui et à douter parfois. J’aurais aimé lui apprendre qu’aimer rend heureux. Que haïr rend malade. Que la joie d’être en vie doit toujours être plus forte que les malchances de l’existence. Que le moral est un ballon, qui doit toucher le sol pour rebondir. Qu’il aura réussi si quelqu’un a besoin de lui. Je sais, c’est facile à dire, quand on n’en a pas. Mais je vous l’ai dit au début, les bonheurs inconnus sont ceux qui font rêver.

Je n’ai pas d’enfant, mais j’ai l’amour des gens que j’aime. Des gens dont j’ai besoin. Et qui ont besoin de moi, parfois. Chacun son destin.

Noël, c’est la fête des enfants. Des enfants que l’on a. Mais aussi des enfants que nous sommes. Bref, c’est la fête de tout le monde […] ».

 

Quel joli texte, merci Stéphane Laporte!

 

Photo: Stéphane Laporte

Source: La Presse+

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